Le marché des crypto-monnaies a connu une véritable explosion en 2017 : avec une croissance de 4000 %, sa valorisation est passée de 17 milliards de dollars à 700 milliards l’année dernière. Alors que Warren Buffet leur prédit un avenir funeste, les crypto-monnaies suscitent pourtant un véritable engouement, à tel point que l’on voit la multiplication des alternatives au Bitcoin. De nombreux acteurs viennent s’ajouter à une liste déjà bien fournie des fonds crypto (environ 1400 à ce jour) pour une utilisation concrète ou simplement pour surfer sur la vague.
Kodak, qui a fait faillite en 2013, vient d’annoncer le lancement de KodakCoin, développé en partenariat avec Wenn Digital. Cette crypto-monnaie servira de moyen d’échange et de paiement sur la plateforme KodakOne. Ce service doit permettre de mieux protéger la propriété intellectuelle des photographies numériques. Avec la technologie Blockchain, les photographes pourront recevoir des KodakCoin en échanges de l’utilisation de leurs clichés. KodakOne scannera également le Web pour repérer les utilisations frauduleuses des œuvres couvertes par la plateforme.
La Blockchain au service des droits d’auteurs
La protection de la propriété intellectuelle est un domaine complexe dans lequel un partie tierce (généralement les tribunaux et avocats) doit intervenir pour faire respecter des droits. Les procédures sans fin et les coûts importants ont de quoi décourager les propriétaires des œuvres. Dans le cadre de KodakOne, la Blockchain se substitue à cette tierce partie. En effet, elle fera partie intégrante de l’identité numérique de l’œuvre et il sera ainsi plus évident de prouver la paternité d’une photographie. Kodak va lancer son ICO (Initial Coins Offering) en janvier pour réaliser ce projet.
L’Estonie, pays déjà à la pointe dans les domaines de l’e-gouvernance a également manifesté son intention de créer sa propre crypto-monnaie, l’EstCoin. Cette annonce, ainsi que sa possible indexation sur l’euro ont provoqué la colère de la BCE qui interdit aux États membres de l’Union européenne d’émettre leur propre crypto-monnaie. Toutefois, l’EstCoin ne devrait être utilisé que dans le cadre du programme d’identité numérique lancée par Tallin en 2014. L’e-résidence offre un statut de résident « virtuel » à quiconque, sans nécessité de s’installer physiquement en Estonie.
Des crypto-monnaies à caractère spéculatif
Même si le Bitcoin a monopolisé toute l’attention du grand public, la Blockchain s’est très largement vue dépassée en matière de croissance par Ripple. Quand la première progressait de 1.300 %, la seconde a vu sa valorisation monter de 36.000 %. Avec ses 75 milliards de dollars, la capitalisation de Ripple reste cependant trois fois inférieure à celle de Bitcoin. Sa croissance a néanmoins permis à Seagate, qui possèderait 2 à 3 % du capital de Ripple, de voir son action bondir et de profiter de la stimulation créée par la vogue des crypto-monnaies.
La prise de participation du fabriquant de disques durs dans Ripple Labs peut sembler surprenant, elle l’est toutefois moins que le récent intérêt de Long Island Iced Tea pour les cryto-monnaies. Le fabriquant de thé glacé vient d’annoncer le lancement de Long Blockchain, son alternative au Bitcoin. L’entreprise continuera à vendre des boissons tout en se concentrant sur l’investissement spéculatif, le minage de crypto-monnaies ou encore la conception de smart contracts. Cette stratégie a, entre autres, pour objectif de moderniser l’image de l’entreprise et de valoriser le cours de son action.
Faciliter les paiements à l’intérieur des messageries
Les développeurs d’applications de messagerie comme Kik aux États-Unis, Line au Japon ou Telegram en Russie s’intéressent également aux crypto-monnaies. Ces derniers auraient levé 3,7 milliards de dollars l’an dernier pour développer leur service. Les TON (Telegram Open Network) serviront dans le cadre de micro-opérations à l’intérieur de l’application. Toutefois, le caractère mystérieux de son créateur Pavel Dourov et l’utilisation de l’application dans le cadre d’organisations mafieuses ou terroristes ont de quoi soulever les soupçons de blanchiment, une critique par ailleurs souvent lancée à l’intention des crypto-monnaies de manière générale.
Le champ d’application des crypto-monnaies semble très large et est moteur d’opportunités mais aussi de dérives. Néanmoins, si elles ont parfois un caractère altruiste (Stellar Lumens), cocasse (CryptoKitties) ou symboliques d’un culte de la personnalité (TrumpCoin et PutinCoin), ces nouvelles crypto-monnaies prouvent l’intérêt croissant qu’ont les milieux d’affaires et institutionnels pour cette forme de paiement. Bulle ou pas, la Blockchain permet à certains de faciliter et fiabiliser des transactions quand pour d’autres, elles sont simplement une nouvelle source de croissance en levier d’un business-model déclinant.