L’élection d’Emmanuel Macron et la politique d’allégement des règles à destination de la finance ont pour but d’attirer à Paris les établissements bancaires et financiers de Londres déçus par le Brexit. Mais il faut faire face à une rude concurrence européenne.
« Emmanuel Macron sera le candidat des banques et des finances !» C’était l’une des critiques entendues lors de la campagne présidentielle et le nouveau président ne va pas les faire mentir. Car il veut en effet ouvrir les portes aux établissements bancaires et financiers étrangers. Son regard se tournant plus particulièrement vers Londres, où des empires financiers affolés après le vote du Brexit, cherchent une porte de sortie.
HSBC veut délocaliser 1.000 emplois à Paris
Pour l’heure, seul HSBC a annoncé vouloir délocaliser 1000 emplois à Paris. Les cinq grosses banques américaines présentes à Londres et générant 40.000 emplois ne se sont quant à elles pas encore prononcées.
Depuis l’officialisation de la sortie de l’Europe du Royaume-Uni, on assiste donc à une cour assidue de la part de plusieurs métropoles européennes pour attirer les établissements étrangers. Ainsi, Amsterdam, Dublin, Francfort mais aussi Luxembourg et Bruxelles font leur numéro de charme pour attirer et accueillir les acteurs de la finance internationale.
Devant cette concurrence féroce, Paris a mis du temps à réagir, gênée par l’incertitude concernant son futur gouvernement. Depuis la fin du mois de mai, en revanche, le Premier ministre, Edouard Philippe, ainsi que Valérie Pécresse, la présidente de la région Ile-de-France, ont travaillé main dans la main pour dérouler le « tapis bleu blanc rouge » aux investisseurs étrangers.
Récupérer les salles de marchés pour l’Europe
Selon Edouard Philippe, toute arrivée à Paris d’une grosse structure ou d’une personnalité liée à la finance sera vectrice de créations d’emplois. Concrètement, l’enjeu est de récupérer les salles de marchés pour l’Europe, base des structures qui génèrent de l’activité ensuite. En faisant de cet enjeu une priorité, le chef du gouvernement a annoncé, le 7 juillet dernier, toute une série de nouvelles règles qui formeront la base de l’allègement des contraintes pour les établissements financiers.
La mesure phare est sans doute la réduction du coût du travail qui passe par deux axes forts: une suppression du taux majoré de 20 % pour la dernière tranche de la taxe sur les salaires et un coût de licenciement moins important, en particulier pour les traders qui bénéficient d’un statut spécifique. Désormais, les bonus différés attribués aux traders ne seront pas pris en compte par les calculs de licenciement.
Une baisse progressive de l’imposition des sociétés jusqu’à 25 %
Une nouvelle cour de justice, basée sur l’île de la Cité et rattachée à la cour d’appel de Paris sera spécialisée dans les contentieux à haute technicité juridique. Une manière de montrer que les litiges ne seront pas compliqués par la sur-réglementation. Le but ? Simplifier au maximum !
Les nouvelles règles fiscales françaises, non spécifiques aux sociétés financières, constituent également un argument de vente. On devrait ainsi assister à une baisse progressive de l’imposition des sociétés jusqu’à 25 % (un objectif fixé pour 2022), les valeurs mobilières devraient disparaître de l’ISF (impôt sur la fortune) et un prélèvement unique à environ 30 % des produits du capital.
Autre « cadeau » de bienvenue du nouveau gouvernement, le retrait du projet d’extension de la TTF (taxe sur les transactions financières) aux transactions journalières prévu pour 2018.
Séduire et attirer les familles
Ensuite vient l’opération séduction pour les familles des expatriés. Très récemment, la version anglaise du site Internet de la région Ile-de-France a fait peau neuve. Une fois cette mise à jour opérée, Valérie Pécresse a tissé sa toile avec une campagne de publicité attrayante dans l’édition numérique du Financial Times avec le titre : « Welcome to the Paris Region ». Une campagne qui s’est même prolongée outre-Atlantique dans le Wall Street Journal pour attirer le regard des Américains.
Concrètement, Paris va se doter, près de la Défense, d’un grand lycée international pour les enfants d’expatriés. Une assurance-vieillesse pourrait aussi être mise en place pour les nouveaux arrivants.
Un président de la République ancien banquier comme argument de vente
Cinq ans après l’élection du président François Hollande, « l’ennemi de la finance » comme il s’était lui-même défini, l’action d’Emmanuel Macron est en rupture avec le mandat du socialiste. Valérie Pécresse a d’ailleurs évoqué un « un président ouvertement pro-business ».
Avec un président de la République ancien banquier comme argument de vente et des mesures phares à destination de la finance mises en place très rapidement, Paris et la France tiennent leur stratégie pour devenir la nouvelle place forte de la finance européenne. Reste à voir si le retard pris sur les concurrents européens pourra être surmonté.