« La femme qui souffle à l’oreille de Tsipras. » C’est par cette formule que l’on doit au journal grec Fileleftheros qu’est sortie de l’ombre Anne-Laure Kiechel, banquière française de 43 ans. Seule femme à atteindre le rang d’associée gérante de la banque Rothschild, la quadragénaire est spécialiste en conseil pour les Etats.
En décembre 2018, Vanity Fair l’a élevé au dix-neuvième rang des Français les plus influents de l’année pour son travail en Grèce, où son action menée auprès du Premier ministre Alexis Tsipras, commence à porter ses fruits puisque le pays voit poindre une sortie de crise avec l’allègement de sa dette obtenu en juin 2018.
Anne-Laure Kiechel : une surdouée
Véritable surdouée, Anne-Laure Kiechel est brillante en mathématiques et étudie maths sup et maths spé avant d’intégrer HEC. Baladée par les déménagements successifs de ses parents, elle étudie au lycée français Rochambeau de Washington, au lycée Louis-Legrand à Paris et en plus d’HEC, est diplômée de l’université de Saint-Gall, en Suisse, et d’un master en mathématiques.
Elle pratique le piano quotidiennement jusqu’à ses 16 ans (à raison de 6 heures par jour !) mais abandonne l’idée d’une carrière le jour où un professeur lui concède qu’elle ne sera jamais une virtuose internationale. Cet arrêt de la pratique du piano est l’illustration parfaite de son attrait exclusif pour l’excellence et rien d’autre, transmise par des parents exigeants avec leur fille unique.
Son père est un pharmacologue engagé dans l’humanitaire (il est membre fondateur de l’ONG Drugs for Neglected Diseases Initiative) et les racines familiales protestantes, alsaciennes et germano-suisses offrent à Anne-Laure Kiechel l’opportunité de baigner très tôt dans la culture germanophone et de parler ainsi l’allemand couramment.
Chez Lehman Brothers lors de la crise de 2008
Elle débute sa carrière professionnelle en 1999 chez Lehman Brothers où elle reste dix ans et vit avec stupeur la crise de 2008 qui la pousse à quitter son poste à Londres pour rejoindre Rothschild. Au sein de sa nouvelle maison, c’est elle qui participe avec Stéphane Charbit à la création et au développement du département de conseil pour les Etats. Elle aime aujourd’hui davantage se définir comme une « conseillère » plutôt qu’une « banquière » et elle préfère avoir de « l’impact » plutôt que de « l’influence ». Elle se voit avant tout comme une fervente défenseuse de l’unité européenne.
Sa franchise, sa grande force de caractère et ses compétences lui permettent d’exister dans un milieu largement dominé par les hommes. On lui prête une autorité naturelle, une capacité à ne dormir que très peu, une force de persuasion et une connaissance aiguisée de ses sujets, ce qui lui avait d’ailleurs permis de gagner la confiance d’Alexis Tsipras en moins de deux heures lors de leur premier rendez-vous.
L’Argentine, l’Ukraine, l’Albanie, le Bénin, le Sénégal…
Avec sa petite équipe de conseillers spéciaux, elle œuvre pour redynamiser les économies de l’Argentine, de l’Ukraine, de l’Albanie, du Bénin, du Sénégal ou encore de la Côte d’Ivoire même si c’est toujours la cause grecque qui occupe la majeure partie de son agenda.
Passionnée de théâtre et d’opéra, elle pratique le mécénat en soutenant le festival de Salzbourg et l’opéra de Paris et aime couper complètement avec son travail quelques semaines dans l’année. Discrète, de sa vie privée elle ne dévoile rien si ce n’est que, en décembre 2018 lors de vacances en Thaïlande, elle a entendu des touristes grecs dire à des Français que leur pays « va mieux ».