Vincent Bolloré, pressenti pour une retraite anticipée il y a encore quelques jours, accélère la prise de contrôle de Lagardère annoncée depuis quelques mois.
Une OPA bienvenue par Lagardère
Fragilisé par un différend juridique avec le fonds britannique Amber Capital, le groupe Lagardère était près à se faire absorber par Vincent Bolloré. C’est désormais chose faite, ou presque, puisque lors du bicentenaire de Vivendi du 17 février, le chef d’entreprise n’a finalement pas annoncé sa mise en retrait. Au contraire, c’est bien lui qui va mener l’OPA visant à acquérir les parts qui lui manquent, et avec le soutien d’Arnaud Lagardère qui plus est.
Ce lundi 21 février, le directoire de Vivendi doit encore se réunir pour valider les détails de l’opération avant de les transmettre à l’Autorité des marchés financiers (AMF), il ne reste plus qu’à l’organisme de régulation de la Bourse de se prononcer sur la conformité de l’offre. Cela ne devrait pas poser de problème vu que Vivendi, qui possède déjà 45 % de Lagardère, a même relevé son offre. Initialement fixé à 24,10 euros par titre, le prix est désormais fixé à 25,50 euros pour permettre aux actionnaires souhaitant se retirer de vendre leurs parts rapidement et en toute sérénité. Pour ceux qui souhaitent rester, nul doute qu’ils seront eux aussi ravis de voir le prix total de leurs parts grimper, et suivront ainsi l’offre proposée par Vincent Bolloré.
OPA ne signifie pas forcément hostilité
Selon les premiers éléments rassemblés, l’opération publique d’achat se fait en « concertation » avec Arnaud Lagardère, qui a publiquement apporté son soutien à la manœuvre. C’est d’ailleurs lui qui avait à l’origine appelé Vincent Bolloré pour contrer les ambitions du fonds britannique Amber Capital, qui détient actuellement 17,5% du groupe Lagardère. Le fils de Jean-Luc est depuis devenu un patron (presque) comme les autres, visiblement ravi de l’arrivé de Bolloré : « pour Europe 1, c’est une bénédiction d’avoir Vincent Bolloré » avait-il dit au JDD, un des journaux maison. La messe est dite.
En outre, la réaction favorable à la prise de contrôle ne s’est pas non plus faite attendre du côté de la Bourse. Dès l’annonce de l’OPA en septembre dernier, l’action Lagardère avait pris 20 %.
Pourtant, du côté des employés, tous ne sont visiblement pas aussi sereins. Il faut dire que Vincent Bolloré n’est pas réputé pour sa culture de non-interventionnisme…
Le monde de l’édition s’inquiète
En cas de succès de l’opération, le géant des médias Vivendi restera en effet seul maître à bord de Lagardère. Sans oublier de renforcer son statut de poids lourds mondial de l’édition et des médias.
Déjà propriétaire de Canal + et d’Editis, l’intégration de Lagardère par Vivendi signifierait également l’obtention d’Hachette. La force combinée des deux plus grandes maisons d’éditions françaises ainsi réunies serait évidemment difficile à contrer, aussi bien dans le secteur de l’édition d’ouvrage, mais également dans leur distribution ou leur diffusion. Une puissance telle que le marché du livre français n’a jamais connu, et qui n’inspire guère confiance au syndicat national de l’Édition (SNE), très attaché à la diversité éditoriale et commerciale du monde du livre.
Si personne chez Hachette ne semble vraiment surpris du rachat, beaucoup craignent visiblement la perte de la culture maison, Et surtout, il y à fort à parier qu’ils se souviennent l’acharnement avec lequel Vincent Bolloré avait poursuivi en justice deux ouvrages détenus par Hachette : Informer n’est pas un délit, et Vincent tout-puissant,
Et bientôt, ce même Vincent sera justement le patron omnipotent d’Hachette…
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