Après plusieurs mois de mensonges, Jérôme Cahuzac a reconnu posséder un compte à l’étranger. L’ancien ministre du Budget est mis en examen pour fraude fiscale et risque de ne plus pouvoir exercer aucune fonction politique. Une honte pour un Etat qui prône « l’exemplarité ».
Confessions de Cahuzac sur son blog
L’information est tombée comme un couperet ce mardi 2 avril et nous avons encore tous du mal à la digérer. Dans un billet publié sur son blog, Jérôme Cahuzac a avoué détenir un compte à l’étranger depuis une vingtaine d’année. Il a rencontré les juges pour reconnaître les faits et ainsi leur confirmer ce qu’il continuait à nier depuis des mois : « J’ai rencontré les deux juges aujourd’hui. Je leur ai confirmé l’existence de ce compte et je les ai informés de ce que j’avais d’ores et déjà donné les instructions nécessaires pour que l’intégralité des actifs déposés sur ce compte, qui n’a pas été abondé depuis une douzaine d’années, soit environ 600.000 euros, soient rapatriés sur mon compte bancaire à Paris. » A l’issue de ce rendez-vous, les juges d’instruction Roger Le Loire et Renaud Van Ruymbeke l’ont mis en examen pour « blanchiment de fraude fiscale ».
Le compte en question, basé en Suisse, n’aurait pas été abondé depuis 2001 et aurait été transféré à Singapour en 2009. Les sommes qui y était versées proviendrait de ses activités de chirurgien et de consultant pour l’industrie pharmaceutique. Un possible conflit d’intérêt en plus d’un « blanchiment de fraude fiscale » ? Comment un tel mensonge a-t-il été possible ? Et surtout, comment un président qui avait fait campagne sur le thème de la « République exemplaire » pourra-t-il relever la tête après une telle trahison ?
Les remords de Cahuzac
Sur son blog, Jérôme Cahuzac demande pardon et explique son mensonge ainsi : « J’ai mené une lutte intérieure taraudante pour tenter de résoudre le conflit entre le devoir de vérité auquel j’ai manqué et le souci de remplir les missions qui m’ont été confiées et notamment la dernière que je n’ai pu mener à bien. J’ai été pris dans une spirale du mensonge et m’y suis fourvoyé. Je suis dévasté par le remords. » Ses remords ne suffiront pas à laver son honneur. Autant le dire d’emblée : sa carrière d’homme politique est terminée. Un ministre du Budget qui fraude lui-même ? On croit rêver.
Exclu du Parti socialiste, indésirable à l’Assemblée nationale et peut-être bientôt interdit d’exercer une fonction politique, comme l’a annoncé François Hollande, Jérôme Cahuzac a de quoi regretter son acte.
Mais à travers cette affaire, c’est surtout une question qui m’inquiète : comment les Français peuvent à nouveau faire confiance aux hommes politiques après quatre mois de mensonges et de démentis sur l’enquête menée par le site Mediapart ? Comment le gouvernement a-t-il pu passer à côté ? Après la mise en examen de Nicolas Sarkozy, cette onde de choc donne un bien triste visage de la France et de sa gestion des finances.
La colère des politiques français
De cette affaire, il faut retenir la colère du socialiste Gérard Filoche, ancien inspecteur du travail, qui résume, je pense, le dégoût d’un bon nombre de Français. Les larmes aux yeux, il a réagi à cette annonce sur LCI : « C’est la misère dans le pays, il y a 5 millions de chômeur, il y a 10 millions de personnes qui sont pauvres, qui ont moins de 900 euros par mois (…) et on a un ministre du budget qui fraude lui-même ! Qui ment, les yeux dans les yeux ! ». Et maintenant on va chercher quelques milliards dans les allocations familiales, dans les petites retraites… (…) je ne peux pas tolérer ça ! »
A présent, il en revient à l’Etat de prendre la mesure de cette affaire, qui en cache sans doute beaucoup d’autres. Pointer du doigt Jérôme Cahuzac ne suffit pas. Il faut agir pour que la fiscalité ne soit plus synonyme de fraude et que la République soit enfin exemplaire.