Avant la fin de l’année 2014, Monoprix devrait accepter les bitcoins comme moyen de paiement. D’abord en ligne, puis ensuite dans ses magasins. Monoprix deviendra ainsi la première grande enseigne à accepter la monnaie numérique en France. Un pari risqué pour certains observateurs.
Il sera bientôt possible de faire ses courses à Monoprix en réglant ses achats en bitcoins. Patrick Oualid, directeur e-commerce de l’enseigne de supermarchés a indiqué, dans un entretien accordé au journal le JDN, que Monoprix devrait accepter les bitcoins comme moyen de règlement d’ici la fin 2014.
Pari stratégique ou opération de com ?
Dans un premier temps les transactions auront lieu en ligne, sur le site de l’enseigne. Monoprix prévoit cependant de rapidement accepter les bitcoins dans ses magasins. L’enseigne compte 475 magasins et couvre 85% des villes de plus de 50 000 habitants en France. Les clients utiliseront une application mobile pour régler leur course en monnaie numérique. Monoprix deviendra alors la première grande enseigne à accepter le bitcoin en France. Jusqu’à aujourd’hui, seuls quelques sites internet et quelques cafés et restaurants l’admettent comme moyen de paiement.
L’annonce de Monoprix a fait le buzz. Elle pose de nombreuses questions. Certains analystes n’hésitent pas à y voir un « coup de com » plutôt réussi. En effet, le bitcoin est un sujet en vogue. Il ne se passe pas une semaine sans que la presse ne s’en empare. Pour raconter par exemple l’aventure de Kristoffer Koch, un jeune norvégien qui, fin 2013, est devenu propriétaire d’un appartement grâce au bitcoin. En 2009, il avait acheté 5000 bitcoins pour 150 couronnes (environ 18 euros). Quatre ans plus tard, avec la fluctuation des cours, il était à la tête de 615 000 euros.
Suite à son annonce, Monoprix a fait la une des journaux, en France, en Europe, aux Etats-Unis et en Asie. L’enseigne tend à accréditer l’image d’un magasin précurseur, en phase avec son temps. Monoprix a été une des premières grandes chaines à parier sur les produits bios. Ecologie, nouvelle technologie, on retrouve là des traits qui devraient séduire la clientèle jeune et citadine des magasins.
De 20 dollars à 1000 dollars pour 1 bitcoin
Mais au-delà de l’effet d’annonce, Monoprix semble considérer que la monnaie numérique constitue un moyen de paiement d’avenir. « Ce n’est pas un feu de paille », déclare Patrick Oualid. « Ne pas croire au bitcoin aujourd’hui, c’est un peu comme ne pas croire aux réseaux sociaux au début des années 2000 ». En acceptant les bitcoins, Monoprix se positionne pour l’avenir.
Pour nombre d’observateurs, cependant la démarche n’est pas sans risque. La banque de France a ainsi publié une note en novembre 2013 pour mettre en garde les utilisateurs potentiels du bitcoin. Pour cette institution, le bitcoin n’est pas une monnaie. Rappelons que le bitcoin a été crée en 2009 par Satoshi Nakamoto. Il s’agit vraisemblablement d’un pseudonyme derrière lequel se cache un groupe de développeurs. La monnaie numérique constitue un système autonome, indépendant du circuit bancaire. Sa valeur est fixée par le jeu de l’offre et de la demande. Pour la banque de France, son caractère très volatile, expose les possesseurs à des risques spéculatifs importants. On peut en effet se demander comment Monoprix va établir ses prix en bitcoins. En janvier 2013, 1 bitcoin valait 20 dollars, en novembre de la même année ce même bitcoin s’échangeait à 1000 dollars. En mai 2014, la valeur du bitcoin s’élève à 400 dollars (soit environ 325 euros).
Une goutte d’eau dans un océan
Si les banques centrales se montrent réservées, voir hostiles, d’autres institutions affichent au contraire une réelle confiance. C’est le cas de la banque d’investissement américaine Merrill Lynch pour qui le bitcoin peut devenir un moyen de paiement majeur pour le e-commerce. Même Ben Bernanke, ancien patron de la Réserve fédérale américaine se montre optimiste. Selon lui les monnaies virtuelles devraient s’implanter sur le long terme car elles constituent un moyen de paiement, rapide, sûr et efficient. Quant à l’Allemagne, le pays a déjà reconnu officiellement le bitcoin comme monnaie, afin notamment d’en taxer les revenus.
Pari risqué, pari gagnant pour Monoprix? Seul l’avenir le dira. Pour l’enseigne de supermarchés, les risques semblent néanmoins limités. En effet, le montant quotidien des transactions en bitcoins s’élève à environ 50 millions d’euros contre plusieurs milliards pour les paiements « classiques ». Une goutte d’eau dans un océan. Et si la situation évoluait ? « Nous serons prêts » répond Patrick Oualid, directeur confiant de l’e-commerce à Monoprix.