Le géant du commerce en ligne poursuit son ouverture vers de nouveaux secteurs en s’orientant vers la finance. Une ambition qui effraie les institutions bancaires traditionnelles qui comptent sur certaines règles afin d’empêcher le secteur d’être révolutionné par la firme de Jeff Bezos.
Et si un jour, Amazon possédait la planète entière ? Le trait de cette caricature est à peine forcé tant le leader mondial du commerce en ligne possède un appétit féroce. On sait depuis quelques mois qu’Amazon souhaite diversifier ses activités et viser de nouveaux marchés puisque la multinationale a dernièrement poussé la porte de l’agroalimentaire, de la santé ou encore de la vidéosurveillance par le biais d’acquisitions de grande ampleur. Désormais, l’entreprise dirigée par Jeff Bezos, l’homme le plus riche du monde selon Forbes, s’attaque au monde de la finance.
C’est le Wall Street Journal qui dégaine la nouvelle, le 5 mars dernier : Amazon serait sur le point d’investir le secteur de la finance en voulant créer son propre compte chèque pour ses utilisateurs. Une information qui fait l’effet d’une bombe parmi les grandes banques traditionnelles.
Déjà des cartes Visa pour les clients Amazon
La firme de Seattle n’arrive pas en terrain inconnu puisqu’elle propose déjà depuis l’an passé des cartes Visa à ses clients Premium afin de limiter les frais entre eux et les établissements bancaires au moment des transactions. C’est d’ailleurs ici que se situe l’objectif du géant de l’e-commerce. Réduire au maximum les prélèvements traditionnels en supprimant les intermédiaires entre l’entreprise et les clients.
Amazon aurait anticipé une économie annuelle de 250 millions de dollars dans le cas où seulement 15 % de ses clients utiliseraient un compte Amazon et non plus leur carte bancaire pour effectuer leurs achats en ligne. L’idée serait dans un premier temps de viser la jeune génération, celle ne disposant pas encore d’un compte courant et de leur proposer une offre bancaire afin de faciliter leurs achats.
La finance veut se protéger grâce à la régulation
Les grandes banques américaines (et les autres) observent l’intérêt d’Amazon avec une grande méfiance. Pas question pour elles de se faire manger à n’importe quelle sauce. Certaines, telle JP Morgan, seraient déjà en négociation avec la firme de Seattle. Cette dernière est à la recherche d’appuis afin de faciliter son intégration dans un monde qui possède de nombreuses règles destinées à ne plus voir n’importe qui se lancer dans ce milieu et déréguler un marché très instable. C’est d’ailleurs sur ces règles que comptent s’appuyer les grands noms de la finance pour empêcher une intrusion trop virulente du leader du commerce en ligne. Il y a quelques années, le géant américain de la grande distribution Walmart s’est déjà cassé les dents sur ce système lorsqu’il a souhaité créer sa propre agence bancaire.
Les règles en vigueur sont celles qui ont été mises en place en 2008 après la crise financière afin d’encadrer le secteur bancaire. Une régulation d’abord contraignante qui devient tout à coup une aubaine pour les institutions bancaires qui sentent le souffle d’Amazon sur leur nuque.
En effet, selon une étude du cabinet Bain, il faudrait à peine cinq ans à l’entreprise de Jeff Bezos pour rivaliser avec la Wells Fargo, la troisième banque américaine. Amazon pèserait, avec ses 737 milliards de dollars de capitalisation boursière, déjà autant que les deux plus grands noms américains de la finance, JP Morgan et Bank of America.
Partenariat plutôt que concurrence ?
Mais Amazon connaît sans aucun doute le contexte et la régulation internationale qui s’appuie sur des principes de base très onéreux et une difficile acquisition d’une licence bancaire. Des contraintes presque rédhibitoires pour le moindre novice dans le milieu. C’est sans doute pour cette raison que l’entreprise de Jeff Bezos s’est rapprochée de JP Morgan afin d’immerger le marché en tant que partenaire plutôt qu’en tant que concurrent. Son champ d’action pourrait aller d’une simple ouverture de compte courant jusqu’à de l’assurance ou du rachat de crédit ou de dette.
Amazon possède d’ores et déjà des avantages fondamentaux sur les banques traditionnelles. La multinationale s’épargne des frais d’agence puisque tout peut être géré en ligne, elle dispose de services déjà opérationnels mais possède surtout une banque de données très approfondie au sujet des habitudes des consommateurs. Elle peut ainsi proposer des formules adaptées à ses clients et s’immiscer encore davantage dans leur quotidien.
Alors que Donald Trump, le président des Etats-Unis, se positionne clairement en adversaire d’Amazon et de Jeff Bezos, qu’il accuse de ne pas payer assez d’impôts, le leader du commerce mondial en ligne ne semble pas s’émouvoir et continue de tisser sa toile dans l’économie mondiale. Au point de créer un néologisme aux Etats-Unis : se faire « amazoniser ».