L’un se déplace à bord d’un vieux SUV. L’autre n’a même pas de voiture. Encore moins de jet privé, ni de yacht. Rien de tapageur ni d’ostentatoire. Pourtant, les inséparables jumeaux Winklevoss peuvent se prévaloir d’une fortune dépassant le milliard de dollars, ainsi que d’une notoriété dans les domaines plutôt variés de l’aviron, des réseaux sociaux et des cryptomonnaies, le tout rendu célèbre grâce au film aux trois Oscars « The Social Network ». Et ils n’ont que 36 ans.
Famille patricienne
Cameron et Tyler avaient certes tout pour réussir. Nés en 1981, les jumeaux passent leur jeunesse dorée dans le Connecticut, auprès d’un père professeur à la prestigieuse université de Wharton, auteur de nombreux ouvrages sur les mathématiques et l’économie, et fondateur d’un cabinet de consulting ainsi que d’une entreprise de logiciels.
Dès leur plus jeune âge, les Winklevoss côtoient la haute société, apprennent le piano, le latin et le grec. Incontestablement doués, les deux jumeaux entreprennent en 2000 des études d’économie à Harvard. C’est sur le campus que leur vient l’idée de créer un site Internet capable de mettre en relation les étudiants de leur université. Le concept est inédit, bien pensé ; il pourrait même être étendu à travers tout le pays. Fébrilement, les jumeaux passent des nuits blanches à peaufiner leur trouvaille, mais se heurtent à un obstacle a priori facile à résoudre : trouver un développeur capable de donner vie à leur projet baptisé « ConnectU ».
Winklevoss vs Zuckerberg
Ils se tournent tout naturellement vers un autre étudiant, véritable génie de l’informatique, à qui ils font part de leurs ambitions. Emballé, le geek à capuche les écoute, prend des notes et promet de s’atteler à la tâche. Les semaines passent sans que le codeur ne donne de nouvelles. Ce n’est que plus tard que les deux frères découvriront que l’informaticien, un dénommé Mark Zuckerberg, a monté son propre site, « Thefacebook.com », ressemblant beaucoup au projet initial des Winklevoss. Une longue procédure s’engage alors pour revendiquer la paternité du concept, tandis qu’en parallèle, Facebook attire des milliers, puis des millions d’utilisateurs. Ce qui n’empêche pas les jumeaux de terminer leurs études avec brio et de s’illustrer dans la discipline de l’aviron. Avec le brio qui les caractérise, puisque les deux seront intégrés à l’équipe américaine aux JO de Pékin en 2008, et finiront sixièmes.
Deux ans plus tard, le jugement est enfin rendu dans le procès retentissant les opposant à Mark Zuckerberg : ce dernier garde l’usage de Facebook, mais doit dédommager les Winklevoss. 45 millions de dollars leur seront octroyés en actions Facebook, et 20 millions en cash. C’est cette somme qui leur servira à miser gros, très gros, sur une cryptomonnaie qui commence alors à faire parler d’elle : le bitcoin.
Milliardaires… selon les jours
C’est en 2013 que Cameron et Tyler, disposant d’autant de flair que de capacité d’investissement, se tournent vers le bitcoin. Et pas de n’importe quelle manière : ils décident d’y investir 11 millions de dollars, somme qui leur permet d’acquérir la bagatelle de 91.600 bitcoins. Le cours, qui ne dépasse alors pas les 120 dollars par unité, s’envole pour atteindre son record à 19.843 dollars le 17 décembre 2017, faisant des frères Winklevoss les premiers milliardaires dans cette devise. Des milliardaires qui ne le sont pas tous les jours, au vu de la grande volatilité des cours de la célèbre et sulfureuse cryptomonnaie.
Mais les jumeaux croient plus que jamais à ce nouvel eldorado, dont ils vantent les mérites à longueur de plateaux télé. Une monnaie à leur avis plus sûre que l’or, promise à un avenir radieux, et pouvant, toujours selon leurs prévisions, multiplier sa valeur actuelle par 40 au cours des prochaines années. Ayant raccroché les rames, les Winklevoss se consacrent aujourd’hui pleinement au bitcoin à travers Gemini, la société de transaction spécialisée qu’ils ont fondé en 2015. Seul péché mignon : la fréquentation assidue de la jet-set et des soirées mondaines de Los Angeles, où ils ont élu domicile. C’est bien la moindre des choses, lorsque l’on est milliardaire.