Le gouvernement songe actuellement à un nouveau décret qui pourrait avoir un impact négatif sur les relations franco-chinoises. Selon plusieurs sources, l’exécutif envisagerait des restrictions sur le réseau télécom français qui exclurait indirectement les équipementiers étrangers. Dans le viseur: les asiatiques et notamment les géants chinois ZTE et HuaWei. Les opérateurs concernés auraient déjà été reçus par le gouvernement pour leur faire part de ces décisions à venir. Pourquoi ? Comment et quelles réactions ?
La première raison invoquée pour cette décision est la « cyberdéfense ». Pour de nombreuses raisons, notamment pour se protéger de l’espionnage, il est souvent souhaitable d’éviter d’avoir des compagnies étrangères impliquées dans les réseaux télécoms nationaux. Les Etats-Unis ont par exemple purement et simplement interdits la compagnie chinoise d’opérer sur son territoire.
Officiellement, une mesure de cyberdéfense
Si ce décret est véritablement mis en place, il ne sera au final que le prolongement de ce qui se fait déjà: les équipementiers chinois n’ont déjà pas accès au cœur du réseau français puisque l’autorisation nécessaire pour y accéder leur est constamment refusée par les autorités françaises. Le décret envisagé durcirait les restrictions et étendrait la nécessite d’une autorisation à plusieurs autres domaines du réseau.
L’Agence nationale de la sécurité sur les systèmes d’information (Anssi) serait actuellement en train de mener un audit sur la sécurité des réseaux télécoms français afin d’avoir une idée plus précise des risques possibles.
Alcatel-Lucent, SFR, Bouygues touchés aussi
Outre les restrictions énoncées précédemment, le décret envisagerait également d’interdire l’intervention à distance sur les réseaux français par des centres basés à l’extérieur du territoire. Alcatel-Lucent est tout particulièrement dans le collimateur, puisque l’équipementier français a récemment transféré une grande partie de ses opérations en Roumanie.
Par ailleurs, les dirigeants parleraient également de l’interdiction de certaines stations de base produites par des équipementiers étrangers. Si cette interdiction était mise en place, cela pourrait poser des problèmes importants à SFR et Bouygues Télécom qui s’appuie fortement sur les équipementiers chinois pour leurs stations de base.
En arrière plan, le protectionnisme économique
Si c’est la cyberdéfense qui est invoqué en premier, cette volonté du gouvernement de limiter l’accès aux réseaux par des équipementiers étrangers provient également d’une forte volonté de protectionnisme économique. En restreignant l’accès des compagnies étrangères au marché français, l’exécutif espère pouvoir relancer l’équipementier Alcatel-Lucent qui rencontre actuellement de grosses difficultés. Donc il serait pénalisé d’un côté mais aussi bien gagnant d’un autre !
Les conséquences diplomatiques
Evidemment, cette décision pourrait signifier pour les équipementiers chinois des pertes (ou plutôt un non gain) de plusieurs millions d’euros. Il est fort à parier que le gouvernement chinois n’accueillera pas ce nouveau décret avec le sourire.
La question principale que l’on peut se poser est l’impact que ce décret, si il est effectivement mis en place, aura sur les relations franco-chinoises. Cela n’a en tout cas pas empêché les compagnies françaises que sont Airbus, Suez et Areva de décrocher des contrats juteux lors de la dernière visite de François Hollande en Chine en avril dernier.
Par contre, on peut penser qu’Alcatel-Lucent pourrait être touché par des « représailles » chinoises si ces mesures protectionnistes sont adoptées: l’équipementier français emploie aujourd’hui plus de 12000 salariés dans sa filiale chinoise.
Cette mesure protectionniste (même si elle n’est pas annoncée comme telle) s’inscrit dans la logique de la politique menée par le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, qui vise à favoriser l’industrie française. On peut parier que ce décret, s’il est bel et bien mis en place, ne sera pas du goût de tous, notamment du côté de l’opposition.
La question qui se pose aujourd’hui concerne l’impact que peut avoir une telle mesure protectionniste en ces temps de mondialisation, où les bonnes relations avec l’étranger sont primordiales, et cela d’autant plus avec une puissance comme la Chine. Il est en tout cas certain qu’avec un tel décret, le gouvernement va devoir mettre en pratique ses compétences et talents diplomatiques !