Depuis cinq ans, la Chine mise sur son industrie des panneaux solaires photovoltaïques, au détriment des sociétés européennes. L’UE a décidé de mettre fin au dumping chinois en augmentant les droits de douane. Une bonne solution ? Pas certain.
21 juin, le commissaire européen Karel De Gucht est en visite en Chine pour trouver une solution au conflit affrontant la Chine et l’Union européenne autour des panneaux solaires photovoltaïques. « J’ai bon espoir que nous parvenions à une solution dans les jours ou les semaines à venir », a-t-il déclaré à l’issue des discussions avec notamment le ministre chinois du Commerce, Gao Hucheng.
Depuis quelques semaines, les panneaux solaires sont l’objet d’une véritable bataille. Alors que l’Europe essaye de développer cette filière, la Chine est parvenue à s’imposer comme le numéro un mondial sur le marché, produisant plus de 70% des panneaux solaires et abritant la majorité des fabricants mondiaux. Cette activité menace en Europe 30 000 emplois. Résultat, le 4 juin, l’Union européenne annonce l’augmentation des droits de douane pour ces panneaux solaires venant de Chine : de 11,8% pendant six mois à partir de juin, puis de 47%, si aucun accord n’est conclu, à partir du mois d’août.
En cause : le dumping chinois
Comment en est-on arrivé là ? L’Union européenne crie au dumping, c’est-à-dire à une pratique qui serait contraire à l’esprit de concurrence. Et pour cause : le gouvernement chinois aurait décidé de faire bénéficier les sociétés produisant des panneaux solaires photovoltaïques d’énormes subventions. Le président d’EU ProSun, Milan Nitzschke, l’assure : « Les sociétés chinoises vendent des panneaux solaires en Europe bien en dessous de leur coût de production, avec une marge de dumping de 60 % à 80 % ». Résultat, ces sociétés ne peuvent pas faire faillite, même si elles font des pertes, car l’Etat chinois s’assure de combler celles-ci. Et depuis cinq ans d’investissement dans cette industrie, de fortes économies d’échelle ont pu être réalisées et les coûts de fabrication diminués.
Les États-Unis avaient pris conscience des risques qu’impliquait cette montée de l’industrie chinoise avant nous. En effet, le 10 octobre dernier, ils multipliaient par presque cinq les taxes douanières à l’importation de ces produits. Les importations de Chine avaient alors bien diminuées, mais le problème n’était pas pour autant réglé. D’une part, cette baisse a été contrebalancée par des importations issues d’autres pays asiatiques. D’autre part, les sociétés chinoises ont réussi à passer outre cette taxe douanière en trouvant des intermédiaires dans d’autres pays, notamment Taïwan.
Et si l’Allemagne avait raison ?
Alors, l’augmentation des droits de douane dans l’Union européenne, une fausse bonne idée ? L’Allemagne était dès le départ extrêmement réticente à cette idée. Certes, la Chine doit devenir le principal partenaire de l’Allemagne, mais également, selon le ministre allemand de l’économie, Philipp Rösler, il vaut mieux privilégier le dialogue que la confrontation. La crainte d’une guerre commerciale, donc.
17 États de l’union européenne partagent cet avis, et il me semble qu’ils ont raison. D’une part, comme le montre le cas étasunien, vouloir contrer le dumping chinois par une réplique aussi agressive qu’une augmentation de près de 50% des taxes douanières ne règlera pas forcément le problème en Europe. Il est sûrement déjà trop tard pour relancer l’industrie des panneaux solaires. D’autre part, qui sait comment la Chine va répondre à cette contre-attaque ? Probablement pas en se laissant faire. Elle a déjà trouvé le moyen de passer outre aux Etats-Unis. Pour l’Europe, elle a annoncé une enquête anti-dumping sur le vin en provenance du continent. Nous risquerions donc bien d’y perdre encore plus que ce n’est déjà le cas.