Les directeurs des douanes arabes se sont rencontrés à Marrakech pour faire avancer un projet enlisé depuis plusieurs décennies : une zone de libre-échange et un marché commun arabe.
La réunion tenue fin janvier 2014 à Marrakech entre les directeurs généraux des Douanes des pays arabes a abouti à l’adoption d’un certain nombre de recommandations visant à renforcer la coopération entre les administrations douanières. L’objectif commun est de mettre en place les mécanismes et les outils nécessaires à la création d’une Union Douanière Arabe devant mener, à l’horizon 2020, à un marché commun. La mise en place de ce projet traine maintenant depuis de nombreuses années, victime du grand écart entre les bonnes intentions affichées par les nations membres de la Ligue Arabe et les progrès réalisés.
La création de ce marché de 365 millions d’habitants se heurte depuis sa genèse au manque d’homogénéité des pays arabes. Malgré une histoire souvent commune, particulièrement en matière de développement économique et social, les pays arabes peinent à s’entendre sur les règles devant favoriser leurs échanges. En 2011, les échanges interarabes ne dépassaient pas le 25 milliards de dollars, presque 10 fois moins que ceux entre la France et l’Allemagne la même année. Quant à leurs exportations, elles ne représentaient que 5,8% des exportations mondiales, insuffisant pour qui détient 62% des réserves mondiales de pétrole et 24% de celles de gaz.
Un long processus
Les premières tentatives d’intégration économique remontent aux années 1950. Les 7 membres de la Ligue Arabe (Egypte, Irak, Liban, Arabie Saoudite, Syrie, Transjordanie et Yémen du Nord) signent un traité visant à faciliter les échanges commerciaux de produits agricoles et industriels. Un premier accord à propos d’un marche commun est signé en 1964, suivi d’un autre en 1981 sur l’instauration d’une zone de libre échange et d’une union douanière. Toutes ces tentatives échouent en raison des difficultés économiques et politiques de ses membres. Le projet n’avance pas.
Le processus semble prendre une tournure encourageante en 1997 quand 18 des 22 membres de la Ligue Arabe reviennent sur la création d’une zone arabe de libre-échange. L’objectif commun est alors d’éliminer toutes les barrières commerciales existantes en baissant de 10% par année leurs taxes douanières. Les pays signataires s’engagent ainsi à supprimer les taxes sur les produits industriels d’ici 2005 et à progressivement libéraliser les échanges sur les produits agricoles. L’objectif est alors clair et défini : la création d’un marché commun pour 2008. Il n’existe toujours pas en 2014.
Un nouveau souffle ?
Le débat sur l’union douanière est relancé début 2013 à Ryad durant le 3ème sommet arabe sur de développement économique et social. Le taux de chômage de 16% comme la chute des investissements étrangers (-37%) dans la région suite au Printemps Arabe poussent les dirigeants à relancer l’économie et à s’engager une nouvelle fois à finaliser la mise en place d’une zone de libre-échange. La récente réunion des Directeurs généraux des douanes à Marrakech s’inscrit donc dans cette logique. On y a parlé de recommandations, d’études d’impact, de diagnostics, prouvant encore une fois une volonté commune, mais sans cacher que le projet n’a presque pas avancé ces dernières années.
L’avenir nous dira s’il s’agit cette fois d’une réelle ambition économique ou juste de nourrir encore le mythe d’une Nation Arabe très populaire dans les différentes couches de la population. Nombreux sont en effet les gouvernements qui ont fait montre d’une bonne volonté de façade tout en torpillant le projet d’Union en coulisse. La crainte de voir un rapprochement économique mener à une union politique et une éventuelle perte de souveraineté anime aujourd’hui plus encore que hier les monarchies et les gouvernements de la région.