La conférence annuelle de Boao, qui s’est clôturée le 29 mars dernier, a permis au président chinois Xi Jinping d’apporter de nouvelles précisions sur un projet économique qui pourrait changer la face de l’Asie.
Longtemps concentrée sur son développement interne, la Chine fait montre ces dernières années d’une réelle volonté de s’ouvrir aux investissements étrangers. Une série de mesures ont ainsi été annoncées par le président Xi Jinping, allant de l’amélioration des services fiscaux à la simplification des démarches, en passant par la création d’une nouvelle banque d’investissement accueillant des capitaux internationaux. Mais la conférence de Boao a surtout permis de clarifier le grand projet imaginé par Xi Jinping, et qui devrait, sur le long terme, apporter à la Chine un regain d’influence tant politique que commerciale sur toute l’Asie.
Nouvelles routes commerciales
Les déclarations du président chinois ne laissent aucun doute sur la volonté de mener à bien un projet imaginé en 2013. Le principe en est simple : créer une multitude d’infrastructures, tant en Chine qu’à l’étranger, afin de réactiver la, ou plutôt les routes de la Soie. Afin d’assurer la mise en place de ces nouveaux axes économiques majeurs pour l’Eurasie, une enveloppe d’un montant de 40 milliards de dollars sera allouée par le biais du fonds d’investissement « Silk Road Company Ltd ». Une route terrestre reliant l’Est à l’Ouest partira de la province du Xinjiang pour traverser le Kazakhstan, les plaines d’Asie centrale, l’Iran, l’Irak, la Syrie, puis la Turquie. Le tracé traversera ensuite le continent européen pour atteindre l’Allemagne. Dans ce but, la Chine affirme être prête à financer les infrastructures nécessaires, constituées de routes, de ponts et de voies de chemin de fer. La deuxième facette du projet porte sur la création d’une route maritime traversant la mer de Chine, l’océan Indien, la mer Rouge pour parvenir en Méditerranée via le Canal de Suez.
Enjeux majeurs
Le terme même de route de la Soie frappe les esprits, et constitue en cela une remarquable opération marketing de la part de la Chine, qui compte ainsi attirer une multitude d’investisseurs. La « Route », pour la partie terrestre, et la « Ceinture » pour son pendant maritime devraient placer la Chine dans une position de force non seulement sur le continent asiatique, mais aussi en Europe. En dynamisant ainsi ses exportations, le volume commercial transitant chaque année par ces nouveaux axes devrait atteindre 2 500 milliards de dollars par an. Deuxième économie mondiale derrière les Etats-Unis et premier pays exportateur au monde, la « Ceinture et la Route » apporteront à la Chine d’indéniables avantages économiques alors que le pays est confronté, pour la première fois depuis 24 ans, à une baisse de sa croissance. Mais les enjeux dépassent le simple secteur commercial et rebattront les cartes de la géopolitique mondiale.
Ambitions à long terme
Développer l’inter connectivité des échanges commerciaux permettra à la Chine de sécuriser des approvisionnements dont elle est fortement dépendante. A titre d’exemple, 9% du pétrole et 3% du gaz naturel utilisés par l’Empire du Milieu proviennent de la Russie. L’intensification des transports terrestres et maritimes ainsi qu’une plus grande coopération internationale amèneront, selon le président Xi Jinping, à une amélioration de la stabilité régionale. Une nécessité, puisque certaines zones empruntées par les nouvelles routes de la Soie s’avèrent particulièrement instables, marquées par des velléités indépendantistes, par le terrorisme islamiste ainsi que par une piraterie endémique. Le projet vise aussi à contrer les visées américaines et russes, les deux pays faisant preuve de plus en plus ouvertement d’un intérêt croissant pour l’Asie. Enfin, l’occasion semble idéale pour faire du yuan un nouvel étalon monétaire dans les pays limitrophes. De quoi conforter la Chine dans son rôle de superpuissance du 21è siècle.