Si chaque pays affronte, avec plus ou moins de bonheur, le contexte économique troublé qui caractérise cette décennie, force est de constater que la France éprouve de grandes difficultés à émerger d’un marasme qui semble durablement installé. A cette situation se rajoutent des actes et des décisions pesant lourd sur la réputation du pays, et risquant d’écorner l’image renvoyée auprès des investisseurs étrangers. Quelques exemples s’avèrent révélateurs de cet état de fait.
Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif de mai 2012 à avril 2014, et il y a peu ministre de l’Economie, du Redressement productif et du Numérique, assumait un interventionnisme économique décomplexé. Si, pour certains, cette ingérence s’avère bénéfique pour l’économie française, nombreux sont ceux qui dénoncent une vision tolérée dans les pays émergents, mais dont les conséquences se révèlent catastrophiques en terme de réputation à l’international. La gestion des dossiers Dailymotion, et plus récemment Alstom, ont contribué à freiner les ardeurs des investisseurs étrangers. Alors que le taux de chômage atteint les 10,4%, ce protectionnisme passe mal, et, comme l’exprime un éditorialiste du Wall Street Journal, « Les investisseurs américains ne sont pas les bienvenus en France ». Il ne s’agit pas ici de débattre sur le bien-fondé d’un tel interventionnisme, surtout lorsque l’activité d’une entreprise s’exerce dans des secteurs stratégiques tels que la défense ou le nucléaire. Mais les prises de position très médiatisées du ministre choquent les investisseurs. Se rajoute à cela un véritable problème d’attractivité fiscale, à même de décourager des entreprises étrangères pourtant prêtes à injecter des capitaux.
Une fiscalité trop forte ?
Une étude de la Banque mondiale, qui compare la fiscalité de 189 pays, révèle que la France est l’un des pays taxant le plus les entreprises, en seconde position derrière l’Italie. Et c’est dans l’Hexagone que les charges sociales sont les plus élevées d’Europe. Le taux d’imposition global, pour les petites et moyennes entreprises, atteint 64,7%, alors que la moyenne mondiale se chiffre à 43,1%. Tant qu’une réforme fiscale de grande ampleur n’est pas mise en œuvre, l’attractivité pour les investisseurs restera en berne.
Malgré des engagements pour 2015, annoncés par Manuel Valls dans sa déclaration de politique générale, la marge de manœuvre reste réduite, plombée par une croissance plus faible que prévu. Il serait néanmoins question, pour l’exécutif, de s’attaquer à l’impôt sur les sociétés (IS), afin d’harmoniser ce dernier avec les autres pays européens. S’insérant dans le cadre du Pacte de compétitivité, élaboré en 2012, les premiers actes significatifs ne devraient voir le jour qu’à partir de 2017.
Un pays au bord de la déflation
Moody’s, la célèbre agence de notation, a ces derniers jours revu à la baisse les prévisions de croissance pour 2014, tablant sur 0,6%. Bercy tablait sur un chiffre de 1% pour établir le budget, qui devra donc être réajusté. Pire : la déflation menace, entrainant une baisse de compétitivité des entreprises et une réduction des investissements. Autre mauvaise nouvelle, la baisse du déficit commercial (29,2 milliards d’euros pour le premier semestre 2014) masque une diminution des exportations pour le troisième semestre consécutif. L’amélioration de la balance commerciale ne s’obtient que grâce à la réduction des importations, et ne traduit malheureusement pas une hausse de la compétitivité française.
Où en sont les investissements étrangers ?
Malgré tout, les investissements étrangers, après deux années de baisse, sont repartis à la hausse en 2013. D’après le baromètre Ernst and Young, ces investissements ont permis de créer 14 122 emplois, soit 34% de plus que l’année précédente. Un signe encourageant, mais qui doit être relativisé, surtout s’il est comparé aux résultats bien meilleurs obtenus par l’Allemagne et la Grande-Bretagne. Un vaste travail visant à motiver les investisseurs internationaux à choisir la France plutôt qu’un autre pays européen reste à mener. Selon un analyste d’Ernst and Young, « Pour [les investisseurs], la France ne justifie plus son prix. Ils ont de plus en plus de mal à convaincre leurs conseils d’administration d’investir dans l’Hexagone ».
Même si certains secteurs demeurent encore attractifs, telles les industries du parfum et des cosmétiques, même si Paris reste l’une des métropoles mondiales les plus appréciée par les investisseurs internationaux[vi], cela ne sera pas suffisant, dans une économie globalisée, pour dynamiser une économie nationale depuis bien longtemps fébrile. Des mesures significatives devront être mises en œuvre le plus rapidement possible afin de ne plus donner l’impression d’un protectionnisme et d’un interventionnisme désuets.