Le gouvernement italien planche sur une exonération fiscale pour les contribuables les plus riches. Ceux déclarant leur foyer fiscal en Italie se verraient appliquer un impôt forfaitaire annuel de 100.000 euros quel que soit le revenu déclaré. De cette manière, les autorités transalpines espèrent faire revenir les fortunes italiennes mais aussi attirer de riches étrangers. L’Italie rentre ainsi dans la mêlée avec différents pays européens comme le Portugal, l’Espagne, la Suisse, la Belgique ou la Grande-Bretagne qui se livrent déjà une âpre bataille fiscale pour attirer les gros contribuables du continent.
Le 8 mars dernier, le fisc italien a lancé une procédure invitant les riches étrangers à installer leur résidence fiscale en Italie contre l’impôt forfaitaire de 100.000 euros par an sur leurs revenus à travers le monde. Cette mesure était prévue à la loi de finance 2017. Toutefois, pour pouvoir en bénéficier, les postulants devront répondre à certains critères comme notamment avoir été résident à l’étranger pendant au moins neuf des dix dernières années et bien entendu dégager des revenus suffisamment importants pour que cet impôt soit économiquement rentable.
Attirer les perdants du Brexit
À travers cette mesure, le gouvernement italien vise notamment les chanteurs et les footballeurs traditionnellement séduits par les avantages fiscaux proposés en Grande-Bretagne ou l’Espagne. Au-delà des artistes et des sportifs, les Transalpins veulent attirer des investisseurs étrangers dans le pays et faire revenir de gros contribuables italiens. On pense notamment à des personnalités comme Margherita Agnelli, héritière du groupe Fiat et actuellement résidente en Suisse ou à l’actrice Monica Bellucci, installée au Portugal. Au total, la mesure pourrait attirer un millier de personnes.
La décision italienne intervient alors que les incertitudes sont importantes quant à l’issue du Brexit. Le régime britannique avait favorisé l’arrivée au Royaume-Uni de grandes fortunes et de dirigeants d’entreprises. Ceux-ci ne sont imposables que sur leurs revenus créés localement ou rapatriés dans le royaume. Ceux non rapatriés générés en dehors du Royaume-Uni font, en revanche, l’objet d’une exemption fiscale. Toutefois, ce régime a été durci en avril dernier et est dorénavant limité à 15 ans, ce qui impacte les résidents de longue date. L’Italie espère profiter de cette manne financière.
Une concurrence fiscale entre les pays de l’UE
Les Etats membres de l’Union européenne se livrent une concurrence fiscale féroce à tel point qu’elle est devenue une faille dans la construction européenne. Si un certain consensus au sein des autorités de l’Union émerge, le chemin à parcourir reste encore long. L’année dernière, le Portugal est devenu l’eldorado des retraités européens aisés avec une politique d’exonération d’impôts attractive. Plus largement, il attire de nombreux entrepreneurs séduits par la fiscalité et la qualité de vie du pays. En formulant une proposition comparable, l’Italie est à même de séduire les plus fortunés.
Le système fiscal italien est actuellement composé de six tranches, dont la plus haute (au-dessus 75.000 euros par an) est à 43 %. Cet impôt forfaitaire de 100.000 euros devrait grandement favoriser les revenus largement supérieurs à cette tranche, d’autant que cette disposition fiscale est complétée d’aménagements pour les grandes familles. Une clause permet ainsi d’installer aussi la résidence fiscale de proches en Italie pour un simple supplément d’impôt de 25.000 euros par personne. L’ensemble du dispositif n’est prévu en revanche que pour 15 ans.
Vers un accroissement des inégalités ?
Comme dans tout allègement fiscal envers les plus riches, les mesures prises en Italie s’accompagnent de leur lot de critiques. Vincenzo Visco, ancien ministre des Finances du gouvernement de centre-gauche de Romano Prodi, met en doute l’efficacité d’une telle mesure sur l’économie italienne et craint par ailleurs un accroissement des inégalités. L’ancien ministre y voit un cadeau de Mateo Renzi envers les plus aisés au détriment des classes populaires. De plus, cette mesure pourrait s’avérer insuffisante alors que l’industrie italienne s’essouffle et est fortement endettée.
L’exemple italien pourrait faire école, et d’autres Etats membres de l’Union européenne pourraient suivre le pas. La France, par exemple, possède déjà des niches fiscales susceptibles d’attirer les riches contribuables. Le régime fiscal des impatriés visé à l’article 155 B du Code général des impôts a notamment été remis à jour fin 2016 pour plus d’attractivité. Toutefois, ce régime est bien moins lisible que le dispositif italien. Mais il n’est vraisemblablement qu’une question de temps et d’échéance électorale avant que le gouvernement français ne prenne des mesures comparables.