Écrivains, stars du show-biz, cinéastes, acteurs, chanteurs… Ils sont Français, mais résident à l’étranger pour des raisons fiscales. Pourtant, rares sont ceux qui assument publiquement cet acte hautement symbolique.
Uccle, banlieue chic de Bruxelles
Située au sud de Bruxelles, Uccle, réputée pour ses beaux quartiers, accueille quelques 8 900 Français, qui représentent 10% des habitants de la petite commune. 200 000 Français vivent en Belgique, et si tous ne s’y sont pas établis pour pratiquer l’évasion fiscale, les motivations de certains d’entre eux ne fait aucun doute. Les citoyens français résidant outre-Quiévrain n’étant pas soumis à l’impôt sur la fortune, la tentation est grande, pour les possesseurs de gros capitaux, de traverser la frontière. Dernier en date, le présentateur et humoriste Arthur a récemment déclenché une polémique, et a réagi sur son compte Twitter par une citation en anglais, traduisible par : « Les gens vous jugeront, quels que soient vos actes, donc emmerdez ce qu’ils pensent et faites ce que vous voulez ». Invité d’Alessandra Sublet, il déclare être « très content » de quitter un pays où l’on « n’aime pas la réussite et le succès ».
Fortement médiatisé, le geste d’Arthur ne doit pas faire oublier que de nombreux autres français fortunés ont posé leurs valises en Belgique. Il en va ainsi des familles Meunier et Mulliez, de Bernard Darty, du cycliste Richard Virenque, ou encore du romancier Éric-Emmanuel Schmitt. Résidant un temps en Belgique, Gérard Depardieu a depuis obtenu un passeport russe, pays dans lequel il habite actuellement. Loin de quitter la France en catimini pour cause d’imposition trop élevée, l’acteur n’avait pas été avare de commentaires concernant son départ. « Je n’ai pas besoin de me cacher comme certains hommes politiques », avait-t-il même déclaré au JDD.
La Suisse, Eldorado des riches expatriés
Impossible de dresser une liste des personnalités françaises présentes en Suisse tant elles sont nombreuses. Stars du cinéma, tels Alain Delon ou Isabelle Adjani, de la chanson, comme Patricia Kaas ou Charles Aznavour, capitaines d’industrie, dont la famille Peugeot, Nicolas Puesch, Paul Dubrule, pour ne citer que quelques exemples. Mais ce sont surtout les sportifs qui sont attirés par la fiscalité très douce de ce pays. Presque toute l’équipe de France de tennis, passée et présente, vit chez les Helvètes dans le but, avoué ou non, « d’optimiser » leurs gains. Guy Forget, Arnaud Clément, Richard Gasquet, Gilles Simon, Julien Benneteau, Jo-Wilfried Tsonga, Gaël Monfils, Marion Bartoli, Amélie Mauresmo, sans oublier Yannick Noah. Les footballeurs ne sont pas en reste, et beaucoup ne remettent les pieds dans l’Hexagone que pour disputer un match. Si certains osent justifier leur départ par la recherche d’un meilleur cadre de vie, ou d’un hypothétique « coup de cœur » pour un pays qui n’est certes pas dénué de charme, d’autres, comme Johnny Hallyday, avouent clairement une raison fiscale. « J’en ai marre de payer ce qu’on nous impose comme impôts », avait-il déclaré en 2006. Alors qu’en France le rockeur aurait dû verser 2 millions d’euros d’impôts sur le revenu, sans tenir compte de l’ISF, il n’a été débité que de 560 000 euros dans sa patrie d’adoption. Le gain est loin d’être négligeable, mais n’est réservé qu’aux 2 000 Français qui peuvent justifier d’un séjour de six mois par an minimum sur le territoire suisse.
Lorsque l’imposition fait débat
Les quasis affaires d’Etat et les réactions parfois disproportionnées entrainées par chaque départ posent la question de l’imposition des grosses fortunes. Imposition qui ne manque pas d’être critiquée par celles et ceux qui choisissent l’exil. Sont principalement pointés du doigt l’impôt sur le revenu, l’ISF et la taxe à 75% mise en place par François Hollande. Toutes les personnalités françaises ne cèdent heureusement pas aux sirènes de l’exil fiscal, puisque de gros revenus tels que Patrick Bruel, David Guetta ou Yoann Gourcuff ont déclaré vouloir continuer de vivre en France, et d’y payer leurs impôts. Mais cela n’empêche pas chaque année la perte de 50 milliards d’euros pour l’administration fiscale française, dû non seulement au départ de célébrités, mais aussi aux montages financiers d’entreprises avisées.
Manque impardonnable de solidarité et d’esprit citoyen, ou réaction normale face à une pression fiscale décidemment trop forte ? Nul doute que les avis diffèrent selon qu’ils proviennent de la majorité des Français contraints de payer leurs impôts, ou des 600 exilés fortunés qui décident chaque année de quitter le pays pour des cieux à la fiscalité plus clémente.