Le 17 août, le Tribunal de commerce de Lille a choisi la Financière Immobilière Bordelaise (FIB) pour reprendre l’enseigne Camaïeu. Une nouvelle corde à l’arc de Michel Ohayon, self-made man devenu 144e fortune de France.
Des débuts dans le prêt-à-porter
La boucle est bouclée pour le quinquagénaire, qui a justement démarré en ouvrant un magasin Daniel Hechter en 1984, alors qu’il n’avait que 22 ans. Rapidement, les ventes s’envolent, et il ouvre une quinzaine de magasins à travers Bordeaux. Surtout, il commence à investir en parallèle dans l’immobilier. Dans les années 90, le Bordelais parti de rien est déjà à la tête d’un petit empire.
En 1999, le portefeuille d’affaires de Michel Ohayon continue de s’étoffer et il décide d’entrer dans le monde de l’hôtellerie. Et ce, par la grande porte en rachètant le Grand Hôtel de Bordeaux, ainsi que les bâtiments aux alentours pour pouvoir l’agrandir et multiplier par six sa superficie. Encore un pari réussi, puisqu’il remporte le prix de «meilleur hôtel de France». Depuis, Michel Ohayon est un nom qui pèse lourd dans le monde de l’hôtellerie, puisqu’il est notamment propriétaire du Trianon Palace de Versailles, du Sheraton de Roissy ou encore du Waldorf Astoria de Jérusalem.
Il continue de se diversifier en achetant le vignoble du Château Trianon en 2017, ou encore 22 magasins Galerie Lafayette en 2018. Puis, il tourne son regard vers l’industrie des jeux et jouets. Fin 2018, il fait l’acquisition de la Grande Récré, alors en plein redressement. Quant à Camaïeu, le dernier arrivé dans le giron Ohayon, il se réjouit de sa reprise par FIB. La Financière Immobilière Bordelaise s’est en effet engagée à conserver 511 magasins et 2 659 salariés sur les 3 146 que compte la marque. Soit 65 magasins et surtout 139 emplois de plus que ce qu’avait prévu de sauvegarder l’ancienne direction.
Le stratège
Avec un tel historique de rachat et d’acquisition, on pourrait prendre Michel Ohayon pour un acheteur compulsif, presque un flambeur. Que nenni !
Le Bordelais est au contraire réfléchi, attentif au détail. Par exemple, il est depuis longtemps avide de biographies d’entrepreneurs. De Trump à Steve Jobs, Michel Ohayon veut comprendre avant d’entreprendre. Par exemple, au moment d’acquérir le Grand Hôtel de Bordeaux, il est en concurrence avec Clément Fayat, un notable bordelais qu’il avait déjà étudié : «En parcourant un jour sa biographie, j’ai découvert qu’il ne surenchérissait jamais face à des institutionnels ou à des fonds d’investissements. En revanche, c’était un franc-tireur quand il s’agissait d’affronter un entrepreneur. Pas question pour lui de se laisser devancer par un jeune téméraire sur ses terres de Gironde.»
Un homme averti en vaut deux, Ohayon décide donc de mandater son avocat pour qu’il s’affiche comme le représentant d’un institutionnel. Résultat: Fayat est bluffé, Michel Ohayon envoie son tapis et rafle la mise. «C’était une belle endormie» admet-il aujourd’hui.
Discret, mais pas timide
C’est peut-être pour ne pas être scruté de la même manière qu’il se fait plutôt discret dans les médias. Si le magazine Challenges l’identifie comme la 144e fortune de France, Michel Ohayon est connu pour éviter les organes de presse. Et quand il prend la parole, c’est généralement pour défendre la réputation de l’entrepreneur qu’il estime malmenée en France.
Particulièrement ces derniers temps, où il constate que les entrepreneurs ayant réussi sont très décriés. Selon lui, un riche n’est pourtant qu’une personne qui prend des risques, qui crée de la richesse, et qui connaît son lot de nuits blanches.
Et pour cet autodidacte qui a construit son empire petit à petit, sans faveur ni héritage, il est difficile d’accepter que les entrepreneurs talentueux soient mis au pilori, plutôt que cités en exemple.
Photos : forbes.fr – lepoint.fr