Tout le monde a encore en mémoire la fronde des chauffeurs de taxi contre Uber il y a quelques semaines. Mais ce qui s’est passé à travers la France en juin dernier ne pourrait être que la première bataille d’une guerre qui s’annonce longue et difficile entre les professionnels du covoiturage et les taxis. Si ces derniers ont réussi à faire plier Uber en France, la donne pourrait être différente si une multinationale influente venait à entrer en scène. C’est justement ce qui est en train d’arriver puisque Google vient de lancer sa propre application de covoiturage, RideWith. Le service n’est, pour le moment, disponible qu’en Israël et n’est dédié qu’aux trajets domicile-travail. Mais lorsque l’on connait l’appétit du géant de Mountain View, taxis, Uber et autres Blablacar ont du souci à se faire.
L’aventure de Google dans le secteur du covoiturage a démarré en juin 2013 lorsque le numéro 1 de la recherche sur Internet rachète la startup israélienne Waze pour près d’1 milliard de dollars ! Waze s’est fait connaitre par le biais de l’application du même nom. Il s’agit d’un système de cartographie et de navigation communautaire élaboré et mis à jour par les utilisateurs eux-mêmes. L’avantage incontestable de Waze face à ses concurrents, en premier lieu Google Maps, c’est sa fiabilité puisque les cartes sont mises à jours en permanence.
Près d’1 milliard de dollars pour Waze
Dès lors, Google a mis la main à la poche pour s’offrir Waze et s’assurer des améliorations conséquentes pour ses propres produits d’orientation. Mais au-delà du simple aspect cartographique, le géant de l’Internet avait sans doute déjà d’autres ambitions.
Ainsi ce n’est sans doute pas un hasard si Google a lancé RideWith en Israël le même mois que la Google Car sur les routes californiennes. On peut même raisonnablement imaginer que les deux services seront vraisemblablement liés dans un avenir plus ou moins proche. Nous aurions alors des voitures autonomes qui pourraient conduire des passagers d’un point A à un point B.
L’application de covoiturage RideWith, développée par la même équipe que Waze s’appuie sur la technologie de celle-ci pour offrir un nouveau service de covoiturage. Le projet pilote, lancé autour des villes de Herzliyya, Ra’ananna et Tel-Aviv, est dédié aux trajets pour se rendre au travail. Il ne s’agit donc pas d’une activité professionnelle comme peut l’être Uber.
Des conducteurs défrayés, pas rémunérés
D’ailleurs, les conducteurs ne sont pas rémunérés mais simplement défrayés. De plus, ces derniers ne peuvent offrir que deux courses par jour et il faut que la personne conduite habite le même quartier et aille travailler dans la même direction que le conducteur. Waze et Google ont bien fait attention, en lançant RideWith, de ne pas raviver la polémique Uber. Il est vrai que le trajet domicile-travail n’est pas un secteur très vendeur pour les taxis.
Google compte sur la grande popularité dont jouit Waze et sur le dynamisme de sa communauté d’utilisateurs pour faire de RideWith un succès. Il est vrai que le projet de cartographie participative de Waze fonctionne aussi bien parce que les utilisateurs se sont approprié le programme. Les développeurs de RideWith espèrent ainsi surfer sur le succès de leur précédente création pour renouveler l’exploit, notamment en y intégrant les infos en temps réel de Waze concernant le trafic.
Un lancement en terrain conquis
Le choix du lieu pour le pilote du projet RideWith n’est pas innocent : Israël, pays d’où est parti le phénomène Waze en 2008. En arrivant en terrain conquis la nouvelle application de covoiturage devrait pourvoir envisager son lancement assez sereinement. De cette phase teste dépende l’élargissement du projet à d’autres pays.
Il s’agit là de la première incursion concrète de Google sur le territoire de chasse d’Uber alors qu’en 2013, le géant de l’Internet avait investi 250 millions de dollars dans la startup spécialisée dans le covoiturage. Procédé étonnant puisque, en termes de retour sur investissement, Google a tout intérêt à ce qu’Uber fonctionne. Mais la situation ne semble pas vraiment surprendre les experts et ce n’est pas une première du genre pour Google. Il y a quelques année, alors qu’Eric Schmidt, l’un des principaux dirigeants de Google siégeait au conseil d’administration d’Apple, la firme de Mountain View lançait le développement d’Android, le plus féroce concurrent de l’IOS dans le secteur des systèmes d’exploitation pour smartphone.
Google fait pression pour changer les lois
D’un point de vue purement économique, Google a bien compris que le covoiturage est un marché sur lequel il faut se positionner, notamment pour préparer l’avenir. Et il est effectivement probable que d’ici quelques temps, Google déclare la guerre aux applications de covoiturage ainsi qu’aux taxis traditionnels. Avec son système tout simplement révolutionnaire, Google pourrait signer l’arrêt de mort de ces derniers.
Avant d’en arriver là, il y aura bien des étapes à franchir pour Google. Mais peut-on vraiment arrêter la firme de Mountain View ? En 2011 déjà, Google avait fait pression sur l’Etat du Nevada pour changer la loi selon laquelle « seul un être humain peut conduire un véhicule ». La loi a effectivement été modifiée et depuis le 1er mars 2012, les voitures autonomes peuvent légalement être immatriculées au Nevada. Le moment venu, les chauffeurs de taxi auront-il suffisamment de poids pour empêcher Google d’arriver à ses fins ? Et quelle légitimité auront-ils pour empêcher la technologie d’avancer ?