C’est en 2015 que le monde de la finance et de la banque a pris conscience des risques encourus avec le réchauffement climatique. Si les mesures prises depuis sont discutables et discutées, un point est avéré, la prise de conscience est réelle.
C’est à la suite de la COP 21 qui s’est tenue à Paris en 2015 que le monde de la finance a réellement pris conscience des risques que le réchauffement climatique faisait peser sur les marchés. Dans la foulée de cette conférence, Mark Carney alors gouverneur de la Banque centrale d’Angleterre et président du conseil de la stabilité financière du G20, prononce un discours qui fera date sous le titre de « la tragédie des horizons ».
Le concept de la tragédie des horizons décrit les impacts d’une catastrophe collective dont les conséquences se répercutent au-delà de l’horizon des politiques actuels. En d’autres termes, Mark Carney alerte le monde de la finance sur le fait que les risques encourus suite au réchauffement climatique ne sont pas pris en compte par les décideurs des marchés dont les politiques se limitent la plupart du temps à un horizon de quelques années.
Qu’est-ce que le risque climatique ?
Mark Carney insiste sur la nécessité d’analyser la situation sur le long terme. Pour ce faire, il définit trois types de risques. Tout d’abord le risque physique, celui-ci concerne les pertes enregistrées par les acteurs économiques suite aux dommages provoquées par les catastrophes naturelles. On estime ainsi qu’en 2022, les catastrophes naturelles ont coûté 10 milliards d’euros à l’ensemble du monde de l’assurance.
Le deuxième risque mis en avant par Mark Carney est le risque de transition. Celui-ci rend compte des conséquences économiques des politiques de transition écologiques mises en place par les gouvernements et les institutions internationales. Imaginons un instant que la proposition de l’ingénieur français Jean-Marc Jancovici visant à instaurer un quota de quatre vols maximum pour une personne durant sa vie soit adoptée, tous les investisseurs possédant des actifs importants dans le transport aérien verraient leur position fortement impactée.
Le troisième risque est le risque de responsabilité juridique. Il s’agit des compensations financières devant être payées par une entreprise, un État ou autre personne morale qui seraient jugés responsables de dommages sur l’environnement.
Stress-test climatique
Suite à la mise en garde de Mark Carney, le monde financier a décidé de réagir en analysant l’impact des risques liés au changement climatique. C’est ainsi qu’ont été mis en place les stress-test climatiques bancaires. Les stress-test ou tests de résistance bancaire, consistent à analyser les réactions du monde de la finance et de la banque dans des conditions de crise extrême liée au réchauffement. Techniquement, les analystes utilisent deux modèles. Dans le cas du changement climatique, un premier modèle de transition progressive, et un modèle beaucoup brutal dans lequel par exemple le réchauffement climatique loin d’être endigué, progresse de manière quasi exponentielle, ou encore la raréfaction des matières premières s’accentue.
C’est en 2020 que la banque de France et l’Autorité de contrôle prudentiel et de règlement (ACPR) ont lancé les premiers stress-test climatique concernant les acteurs du monde de la banque et de la finance en France. Au niveau européen, la Banque centrale européenne (BCE) a fait de même à partir de 2021. Les résultats de ces différentes séries de tests se veulent rassurants. En France, l’ACPR évoque un risque modéré des banques au changement climatique. En Europe, la BCE évalue l’impact des risques financiers d’origine climatique entre 4 % et 10 % du PIB selon le scénario.
Le débat reste ouvert
Ces résultats sont mis en cause par nombre d’institutions comme le Network for Greening the Financial System (NGFS), un réseau d’acteurs et de superviseurs de la finance qui œuvrent pour le « verdissement » du système financier. Ces derniers dénoncent des stress-test climatiques qui ne prennent pas en compte la réalité du réchauffement planétaire et ne permettent pas de prendre les mesures adéquates.
Quoiqu’il en soit, la prise de conscience est effective, aussi bien du côté des acteurs de la finance que de la part des autorités, comme en témoigne la déclaration en février 2021 du gouverneur de la banque de France, François Villeroy de Galhau assurant que les institutions financières mettraient en œuvre toutes leurs ressources afin de « soutenir et compléter l’action collective en matière de lutte contre le réchauffement climatique ».
Photos : academieduclimat.paris et bbci.co.uk et lesechos.com