C’est l’un des enseignements du dernier rapport de la Banque mondiale sur les migrations et le développement de novembre 2021 : les communautés françaises travaillant à l’étranger sont classées au 7e rang mondial pour la quantité d’argent qu’elles envoient vers leur pays d’origine (en l’occurrence la France). Alors que la plupart de ces transferts s’effectuent depuis des pays riches vers des pays pauvres, comment se fait-il que la 5e puissance mondiale figure si haut dans le tableau?
Les transferts opérés par des Français travaillant à l’étranger vers la France ne se font pas sur le même modèle que l’Inde, la Chine ou le Mexique. Pour ces pays situés en haut du classement de l’OCDE, les fonds transférés depuis l’étranger le sont principalement par des personnes travaillant dans des régions à plus fort revenu, et tentant d’aider leur famille restée au pays. En France, ces transferts s’expliquent par plusieurs facteurs, notamment l’importance de notre communauté à l’étranger et le grand nombre de travailleurs transfrontaliers.
La France, une solution sûre pour investir et préparer sa retraite
Le nombre de Français vivant à l’étranger est estimé à 3 millions. Une communauté très importante, également constituée de nombreux binationaux. Tous n’ont pas le même profil, ni le même rapport économique à la France.
Certains d’entre eux, comme les étudiants, les retraités ou les expatriés (envoyés à l’étranger avec un contrat français) sont le plus souvent à l’origine de mouvements financiers allant de la France vers l’étranger. Beaucoup vivent en effet à l’étranger de revenus français (une retraite, une bourse, un salaire versé par une entreprise française, voire par l’Etat pour les diplomates par exemple).
Mais d’autres, qu’ils soient entrepreneurs ou salariés en contrat local à l’étranger, peuvent quant à eux être à l’origine de transferts de fonds depuis l’étranger vers la France. Ces fonds peuvent être motivés par des investissements. Dans beaucoup de pays par exemple, il est impossible d’investir dans l’immobilier en étant étranger. La France devient alors une solution de repli. Il est également fréquent que des salariés ou entrepreneurs ne cotisent pas pour leur retraite dans le système local de leur pays de résidence. Investir en France est souvent un moyen de garantir ses vieux jours.
Les travailleurs frontaliers rapportent 21,8 milliards d’euros par an
Une autre raison de ces transferts est aussi familiale. De plus en plus de familles recomposées vivent par delà les frontières. Les pensions alimentaires, les paiements de frais de scolarité, les vacances en famille… Toute une économie qui peut être alimentée par des Français vivant à l’étranger, parfois dans des pays voisins.
La situation géographique de la France favorise également les travailleurs transfrontaliers. Ils sont 450.000 environ, et leur nombre semble en constante augmentation. Le télétravail et le maintien de la circulation entre pays européens a permis de maintenir cette activité transfrontalière, alors que dans le même temps les mobilités internationales depuis et vers l’Europe ont été fortement ralenties par la crise sanitaire.
On évalue cette année à 21,8 milliards d’euros les revenus étrangers des travailleurs transfrontaliers français, dont plus de la moitié provenant de Suisse.
Les Français de l’étranger, acteurs du soft power français
Outre les fonds qu’ils peuvent directement transférer ou investir en France, les Français vivant ou travaillant à l’étranger sont à l’avant-poste de l’influence de notre pays dans le monde. Culturellement, ils sont les ambassadeurs de notre langue, de notre art, de notre cuisine… Les entrepreneurs français à l’étranger sont un rouage essentiel à nos exportations. Les étudiants français à l’étranger tissent des liens amicaux et professionnels qui faciliteront plus tard nos échanges avec le reste du monde. Les travailleurs humanitaires français œuvrent à la diffusion de nos valeurs…
Il est difficile de chiffrer l’impact économique de nos communautés établies aux quatre coins du monde. Une chose est sûre, la France aurait tort de se priver de cet atout.
Photos : amazonaws.com et etudiant-voyageur.fr