L’UE proposera en 2014 de nouvelles mesures pour lutter contre l’évasion fiscale, notamment des entreprises : des mesures contraignantes qui pourraient rester vaines sans une volonté internationale commune.
Alors que l’Union Européenne proposera des règles plus strictes pour lutter contre l’évasion fiscale début 2014, Algirdas Semeta, commissaire européen en charge de la Fiscalité et de l’Union douanière se félicite des immenses progrès réalisés depuis 2009 grâce aux différentes réformes mises en place sur la fiscalité. Il affirme que 2014 sera l’année de la concrétisation, « au nom d’une fiscalité juste et efficace ». Il est question d’augmenter les échanges automatiques, combler certaines lacunes législatives, taxer l’économie numérique, lutter contre la fraude à la TVA. Suite aux récentes réunions du G20 et du G8, L’UE confirme ici sa volonté d’élargir la lutte contre l’évasion fiscale aux entreprises et multinationales.
La chasse aux milliards
On estime aujourd’hui à 2000 milliards d’Euros le montant échappant aux caisses des Etats de L’Union, un chiffre en constante augmentation depuis le début de la crise et la mise en place des politiques d’austérité en Europe. L’UE a fait de la lutte contre l’évasion fiscale sa priorité et les scandales ne cessent d’éclater aux quatre coins de l’Europe : affaire Cahuzac en France, affaire Hoeness (président du Bayern Munich) en Allemagne, affaire Dolce & Gabbana en Italie, affaires auxquelles s’ajoutent les cas de multinationales telles que Apple, Google, Starbucks, Facebook ou Colgate qui profitent du système en place pour en payer le moins possible, en toute légalité.
La chasse aux milliards disparus est lancée et les progrès depuis 2009 sont bien réels. En Europe, les paradis fiscaux comme la Suisse, le Luxembourg, l’Autriche ont fait des concessions qui devraient mener d’ici 2015 ou 2017 à voir disparaître le secret bancaire. La Grande-Bretagne, championne de monde de l’évasion fiscale, a commencé à mettre la pression et signer des accords d’échange automatique avec ses territoires d’outre-mer (Ile de Man, Jersey, Guernesey, iles Caïman, Bermudes, Gibraltar). Au niveau mondial, un projet de loi a été déposée aux Etats-Unis pour mettre fin aux méthodes appliquées dans le Delaware alors qu’en Asie, la Chine ne cherche plus a épargner Hong Kong et Singapour. Partout l’étau de resserre.
Les règles devraient devenir plus strictes encore ces prochains mois en Europe. Les échanges automatiques entre les administrations fiscales vont se renforcer afin de couvrir à terme tous les revenus et biens financiers. Des mesures vont être prises afin de combler les vides juridiques permettant aux entreprises présentes dans plusieurs pays de ne pas payer leurs impôts ou d’en payer le minimum. De plus les négociations avec les pays voisins comme la Suisse, Andorre, Monaco, San Marin et le Liechtenstein vont s’intensifier. Un groupe d’experts va se mettre en place afin de trouver des solutions sur la taxation de l’économie numérique qui ne connaît pas de frontières. Enfin, les procédures pour lutter contre les fraudes à la TVA qui pèsent 193 milliards d’Euros vont être simplifiées et harmonisées.
Encore beaucoup de travail
Ces mesures devraient rendre la vie un peu plus difficile encore aux fraudeurs mais ne seront certainement pas suffisantes pour stopper l’évasion fiscale car les possibilités sont encore nombreuses. L’Union Européenne va devoir pour commencer balayer devant sa porte : lutter contre les petits paradis fiscaux voisins est une chose, mais avec le Luxembourg, le Royaume-Uni et l’Autriche, le ver est dans la pomme et il faudra beaucoup plus de courage politique pour mettre fin aux pratiques de certains de ses propres membres.
Et puis l’argent voyage vite. Depuis que l’Europe prend de nouvelles mesures, les places financières opaques du Moyen-Orient (Dubaï) et de l’Extrême-Orient (Singapour, Hong Kong) voient affluer de nouveaux capitaux et prennent de plus en plus d’importance sur l’échiquier mondial. Quant aux Etats-Unis, au–delà des bonnes intentions, il faudra régler une fois pour toute la question du Delaware.
Quelques soient les mesures prises par l’Union Européenne, elles ne mettront pas fin à l’évasion fiscale sans une volonté commune des grandes puissances mondiales. Les flux financier qui transitent par les paradis fiscaux de par le monde n’ont jamais été aussi importants et nous pouvons faire confiance aux particuliers comme aux entreprises pour user de toutes leurs ressources, parfois illimitées, afin de profiter de la moindre faille juridique pour se soustraire à leurs obligations. L’évasion fiscale a certainement encore de belles années à vivre.